(BFM Bourse) - La monnaie unique recule nettement face au dollar, en raison de l'incertitude politique en France. Le gouvernement Barnier qui vient d'activer l’article 49.3 de la Constitution pour l'adoption du budget de la Sécurité sociale, s'expose désormais à une motion de censure.
L'euro s'enfonce lundi, plombé par la perspective d'une chute du gouvernement français, visé par une possible censure après que le Premier ministre a engagé sa responsabilité sur le décrié budget de la Sécurité sociale.
La monnaie européenne est en baisse de 0,6% face au billet vert, à 1,0470 dollar, et perd 0,21% par rapport à la devise britannique, à 82,87 pence pour un euro.
Le Premier ministre Michel Barnier a déclenché lundi l'article 49.3 pour faire adopter sans vote le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), entraînant le dépôt annoncé d'une motion de censure par le parti de la France insoumise.
La présidente du groupe Rassemblement national (RN) à l'Assemblée Marine Le Pen a indiqué qu'il déposera sa propre motion de censure, et que ses députés voteraient l'ensemble des motions, y compris celle de la gauche.
Michel Barnier avait accédé lundi à l'une des requêtes du RN sur le PLFSS, en s'engageant à ce qu'il n'y ait pas de déremboursement des médicaments en 2025, mais le parti d'extrême droite souhaitait qu'il renonce également à la désindexation des retraites.
Si le gouvernement s'effondre, "cela pourrait entraîner des coupes budgétaires et d'autres mesures d'austérité susceptibles de nuire à la croissance économique", explique Kathleen Brooks, de XTB.
Par ailleurs, si le RN accède au pouvoir suite à une nouvelle élection, l'analyste doute qu'il soit en mesure de résorber le déficit public français, actuellement au-dessus de 6% du PIB.
"Après l'espoir suscité par des concessions du Premier ministre sur certaines mesures portées par le Rassemblement national, il apparaît que ces efforts ne suffisent pas. Le RN a confirmé son intention de voter la motion de censure déposée en réaction au recours au 49.3 par le gouvernement Barnier. Si les investisseurs avaient initialement salué les concessions du gouvernement, ils se montrent désormais inquiets face à la stratégie politique du RN, qui alimente une escalade dans l’instabilité politique en France", notent les stratégistes de Saxo Banque.
Des tensions sur le marché obligataire
Sur le marché obligataire, l'écart entre le rendement du titre de dette française à 10 ans et celui de même échéance de l'Allemagne, baromètre de la confiance des investisseurs, s'élargit actuellement à plus de 87 points de base (0,87 point de pourcentage).
"Cette instabilité a des répercussions sur les marchés financiers: les taux, qui étaient en baisse, repartent à la hausse pour atteindre 2,91% (+0,70 %). Le spread avec l’Allemagne s’élargit à plus de 87 points de base, effaçant l’accalmie précédente. Les investisseurs sanctionnent le manque de vision et l’incertitude croissante, alors que l’objectif reste de ramener le déficit public à 5% d’ici 2025. Cet objectif sera un indicateur clé pour regagner leur confiance dans les finances françaises", poursuivent-ils.
Un billet vert en forme
Le dollar gagnait également 0,85% face à la devise britannique, à 1,2627 dollar pour une livre, soutenu par les récentes déclarations de Donald Trump sur son réseau Truth Social.
Le président élu a menacé samedi d'imposer des droits de douane "à 100%" aux neuf pays des BRICS, dont le Brésil, la Russie, l'Inde, la Chine et l'Afrique du Sud, qui envisagent de créer leur propre monnaie commune pour se passer du dollar, actuellement monnaie de référence pour les échanges mondiaux.
"Cela signifie qu'à partir d'aujourd'hui, la domination du dollar n'est plus volontaire, mais imposée par les États-Unis", estime Ulrich Leuchtmann, analyste chez Commerzbank.
La semaine dernière, Donald Trump avait déjà dit vouloir imposer des droits de douane de 25% depuis les produits importés du Mexique et du Canada.
Autre facteur de hausse du dollar, l'activité manufacturière aux États-Unis s'est par ailleurs de nouveau dégradée en novembre, mais moins qu'attendu, et les perspectives s'améliorent pour les entreprises américaines après les incertitudes de l'élection présidentielle.
(Avec AFP)