(BFM Bourse) - Alors que le cours du yen décroche face au dollar, la Banque du Japon sonderait les opérateurs en vue d'étudier une intervention sur le marché des changes. La monnaie nippone est à son plus bas niveau face au dollar depuis 24 ans, pénalisée par la distorsion entre des politiques monétaires diamétralement opposées au Japon et aux Etats-Unis.
La Banque du Japon (BoJ) a sondé mercredi des opérateurs du marché des changes, selon la presse locale, une action rarissime renforçant l'éventualité d'une future intervention de Tokyo sur ce marché face à la chute de plus en plus préoccupante du yen.
Interrogé par l'AFP, un porte-parole de la BoJ n'a pas souhaité commenter ces informations du quotidien économique Nikkei.
Un "rate check" de la BoJ consiste à prendre la température auprès des acteurs du marché des changes, a expliqué à l'AFP Toshikazu Horiuchi, analyste de IwaiCosmo Securities. "C'est en quelque sorte un dernier avertissement avant une intervention" de l'Etat sur le marché des changes, a-t-il ajouté.
Un yen à un plus bas depuis 24 ans face au dollar
Le yen s'est effondré cette année face au dollar, qui évolue au-delà de 140 yens depuis la semaine dernière contre 115 yens en mars. La monnaie nippone est à son plus bas niveau face au dollar depuis 24 ans, un phénomène notamment dû au décalage grandissant entre le durcissement accéléré de la politique monétaire aux Etats-Unis contre l'inflation et le maintien d'une politique monétaire ultra-accommodante au Japon, où la hausse des prix est moins marquée.
Le "rate check" de la BoJ a eu pour effet immédiat de soutenir le yen: vers 06H50 GMT, un dollar s'échangeait pour 143,62 yens, alors qu'il avait de nouveau frôlé la barre symbolique des 145 yens en début de séance, au lendemain d'un indice d'inflation CPI plus fort que prévu en août aux Etats-Unis.
Depuis plusieurs jours, le gouvernement japonais multiplie de nouveau des déclarations visant à calmer la tempête sur le yen, en affirmant par exemple qu'il n'exclut aucune option pour enrayer la chute de la monnaie nationale.
Une intervention directe complexe à mettre en œuvre
Une intervention directe de Tokyo, en vendant des dollars issus de ses réserves de change pour acheter du yen, semble toutefois compliquée à mettre en œuvre, car cela nécessiterait une concertation préalable avec Washington, et le succès de la manœuvre ne serait pas garanti pour autant, préviennent nombre d'analystes.
La dernière intervention du Japon sur le marché des changes remonte à 2011, et le précédent "rate check" de la BoJ, en 2016, n'avait pas été suivi d'effet.
La chute actuelle du yen a un effet à double tranchant pour le Japon: cela gonfle en théorie les revenus générés à l'étranger des entreprises nippones quand ces dernières les rapatrient, mais cela pèse sur les importations du pays, qui flambent actuellement à cause de l'envolée des prix de l'énergie et de produits alimentaires sur fond de la guerre en Ukraine. Cela fragilise le pouvoir d'achat des ménages nippons et risque ainsi de freiner la reprise économique du pays.
La Banque du Japon, dont une décision de politique monétaire est attendue le 22 septembre, continue à affirmer pour l'instant que la hausse des prix à la consommation dans l'archipel (+2,4% hors produits frais en juillet sur un an, un niveau record depuis fin 2014) n'est que transitoire car essentiellement liée au fort renchérissement des importations.
(Avec AFP)