(BFM Bourse) - Le cours de la livre turque rechute lourdement en réaction au licenciement, par Recep Erdogan, de trois cadres de la Banque centrale qui ne suivaient pas la ligne fixée par l'homme fort d'Istanbul. Alors que la devise locale a perdu un cinquième de sa valeur face au dollar depuis le début de l'année, l'inflation s'envole elle à près de 20% sur un an.
De mal en pis. Alors que l'instabilité règne toujours parmi les dirigeants des institutions monétaires stambouliotes (contrôlées d'une main de fer par Recep Tayip Erdogan), la livre turque chute à un nouveau creux historique face au billet vert ce jeudi. Quelques heures après le limogeage de trois cadres de la Banque centrale turque, la livre locale a flanché de près de 1% , à un nouveau plus bas de 9,19 livres pour un dollar. Un dollar s'échangeait contre 3,75 livres début 2018.
Les inquiétudes relatives au manque d'indépendance de l'autorité monétaire locale, et les mauvaises décisions prises par le président turc qui la chapeaute pour rétablir la situation, accélèrent la chute de la devise.
Les dernières victimes de Recep Erdogan sont deux gouverneurs adjoints de la Banque centrale et un membre du comité de politique monétaire de l'institution. L'un d'eux avait été le seul à voter contre la baisse du taux directeur en septembre, selon des informations de presse.
Inflation galopante
"La direction [prise par la Turquie] est inquiétante et peu d'investisseurs, voire aucun, vont continuer de croire que la Banque centrale de Turquie prend au sérieux le combat contre l'inflation", estime l'analyste Jason Tuvey, du cabinet Capital Economics
Le président Erdogan a déjà limogé trois gouverneurs de la Banque centrale depuis 2019, sapant la confiance des investisseurs et contribuant à rendre le coût de la vie insoutenable pour une partie des Turcs. Sous sa houlette et malgré une inflation galopante, la Banque centrale avait abaissé son principal taux directeur fin septembre, de 19 à 18%. Recep Erdogan qualifie d'ailleurs régulièrement les taux d'intérêt élevés de "père et mère de tous les maux" et affirme, à rebours des théories économiques classiques, qu'ils favorisent l'inflation. Cette politique de croissance à tout prix a fait grimper officiellement l'inflation à 19,25% sur un an au mois d'août, soit quatre fois plus que l'objectif initial du gouvernement.
Si de nombreuses monnaies d'économies émergentes traversent une passe difficile en raison de craintes d'un resserrement monétaire de la Fed puis de la BCE, la chute de la livre turque est encore plus marquée alors que les investisseurs craignent également une nouvelle opération militaire turque en Syrie après une série d'incidents frontaliers.
(avec AFP)